ROMAN: "Personne ne l'empêchera d'être": Claire Mathy casse quelques clichés sur les Tsiganes
Très attachée aux valeurs humaines, Thérèse Goffart (alias Claire Mathy), autrice de Gilly, nous fait découvrir les Tsiganes à travers leur culture, leurs traditions, ainsi que les contraintes exercées sur les jeunes filles du clan.
JEAN-CLAUDE HERIN
- Comment est née l'idée de ce roman ?
C.M. En 2019, j'ai reçu un coup de fil d'une jeune Tsigane de la région de Charleroi. Lors de trois interviews, elle m'a expliqué les rapports difficiles qu'elle entretenait avec sa communauté, qui, par tradition, réclamait qu'elle se marie très tôt. Après le Covid, je ne l'ai plus revue. Mais elle m'a inspiré le personnage de Nina qui se raccroche aussi à ses études pour essayer de sortir de sa condition. Féministe, je dénonce également l'autorité patriarcale abusive ou encore l'illettrisme dont sont encore victimes bon nombre de femmes tsiganes dans le monde.
- D'une certaine façon, vous voulez réhabiliter la communauté tsigane.
C.M. Tout à fait. Je me suis intéressée à leur très riche Histoire en me documentant beaucoup. Malheureusement, les Tsiganes ont bien souvent une mauvaise réputation, mais c’est surtout parce qu'on les connaît mal. Savez-vous seulement la différence entre des gitan(e)s, des Roms, des Tsiganes (ouTziganes), Peuple du Voyage,... ?
- Vous nous rappelez aussi les drames du Cambodge ou du Vietnam.
C.M. Oui, Nina fait la connaissance de Mom Ouch, une infirmière, rescapée des Khmers rouges, le Vietnamien Thanh, restaurateur du coin, ancien boat people, ou encore Charles Lechat, le jardinier, qui avait fui au Vietnam pour échapper à des maltraitances familiales en Belgique. Ces différentes rencontres permettent à l'héroïne du roman de "relativiser" ses malheurs. La lutte de Nina se situe ainsi dans un contexte plus général. Elle montre comment certaines personnes parviennent à préserver leur humanité au milieu du mal.
- Vous attachez-vous à vos personnages ?
C.M. En effet, ils vivent "en moi" et je vis avec eux, toute la journée, même en dehors des périodes d'écriture. L'humain est au coeur de mes romans. Nina, orpheline, Mamoune, sa maman, Younès, son demi-frère, Tchirklo, son parrain, Ahndréa, la bibliothécaire célibataire,... sont tous très attachants. J'essaie de transmettre l'empathie que j'éprouve pour eux aux lecteurs.
« Personne ne l’empêchera d’être » par Claire Mathy (4ème roman) - 378 pages. 22 euros. Editions Mémory. Ses trois premiers romans: " Dernière pelletée", "Une cerise pour la veuve Marigot " et "Une peau à soi".