Le Centre CEME 

                      Grâce à Emile Fourcault, Dampremy a été le berceau du procédé d'étirage du verre.

Carte d'identité de Dampremy : Une superficie de 2 700 km2 ; 6693 habitants, 69 rues et places, 3 lignes de métro, 2 lignes de bus, une centaine de commerces ( y compris les médecins para-médicaux et pharmacies), 4 terrils ( Piges, Blanchisserie, St Théodore, Sacré Français), 2 parcs ( Yvan Elio et Crawha), la chapelle Saint-Ghislain, la Maison du Peuple,...

Localité jouxtant Charleroi, et riche comme elle par son activité industrielle passée, Dampremy est une commune à la vie associative et culturelle intense. Durant la pandémie, le CEME, structure polyvalente aux vastes missions, s'est fait davantage connaître auprès du grand public, par son centre de vaccination.

Rencontre avec sa manager Sabine Delitte, diplômée en Sciences Politiques et en Droit et employée communale.

Sabine Delitte 

 Votre mission commence en 1995...

S.D. (Sabine Delitte) : Oui, cette année-là, j'ai reçu la mission préalable de cheffe de projet Urban financé par l'Europe, la Région et la Ville pour l'implantation d'un Centre de Congrès, en symbiose avec le Centre sportif Fourcault.

Cinq ans plus tard, l'inauguration de ce Centre a précédé de peu la création de l’ASBL CEME (Charleroi Espace Meeting Européen). La bibliothèque de Dampremy s’est rapidement installée dans les nouveaux locaux du CEME, quittant l'Ecole du Centre de la rue Barré. Jean-Claude Van Cauwenberghe, Ministre-Président de la Région Wallonne, avait pour ambition de faire du CEME un des centres de congrès les plus importants de Wallonie.

- Vous n'avez pas craint la concurrence ?

S.D. : C'est vrai que d'autres espaces de réunions, tels la Géode de Charleroi Expo, le Point Centre de l'Aéropole, le Spiroudôme ou  l'hôtel Van der Valk,... se sont développés quasi simultanément. Et pourtant, nous avons tenu bon. Certes, le CEME n'a pas la capacité du Palais des Expositions, mais il peut tout de même accueillir des salons d'envergure. Un exemple ? Le célèbre Recup Date, un concept que nous avons créé en interne. D'autres réjouissances ont eu lieu comme des marchés de Noël ou le salon du vinyl, encore tout récemment.

-  Des bruits couraient pourtant sur une fermeture...

S.D. De telles rumeurs nous ont porté préjudice. Nous n'avons jamais cessé d'être actifs. En 2019, le Centre de Congrès était toujours « the place to be », où pouvaient se croiser des fêtes multiculturelles, des mariages, des colloques, des formations (par exemple OXFAM ou le MOC),... Nous avons accueilli les « Terrils live », événements musicaux originaux où des groupes de musique venaient chanter en live. Des soirées « années 80 » ont aussi été organisées avec un immense succès, de même que des veillées funèbres en présence de personnalités venues des quatre coins du monde, Washington, Londres,... C’est dire si l’éventail des possibilités d’accueil au CEME est vaste.

- Vous avez pu rebondir après le premier confinement ?

S.D. : Ne le cachons pas : cette période a été difficile. De mars à mai 20, le CEME a dû fermer ses portes. L’ensemble du personnel a été mis en chômage Covid et je suis restée la seule en fonction, reprenant peu à peu l’un ou l’autre membre du personnel. C’est sur fond de crise qu’est né « Charleroi Espace Streaming » en collaboration avec la société Entour. Ce projet ambitieux propose une formule streaming interactive permettant de suivre à distance un colloque en participant aux débats. De nombreux clients ont ainsi pu continuer leur mission à prix doux tout en assurant à l’ASBL une survie bien méritée.

-  Le 22 mars 2016, jour des attentats de Bruxelles, le CEME est devenu le numéro 1 du « plan catastrophe » de Charleroi.

S.D. En effet, le centre a acquis, grâce à sa réactivité et son professionnalisme, ses titres de noblesse. Bon nombre de voyageurs et de touristes devaient atterrir à Bruxelles ont été redirigés vers Gosselies le jour de l’attentat. En l’espace de quelques heures, le CEME est donc devenu  « le centre névralgique du jour » avec des missions inhabituelles (assistance médicale et psychologique, gestion des valises, …).

N.G. Aujourd'hui le CEME a prouvé son efficacité en terme de vaccination.

S.D. Oui, fidèle à sa mission d’ouverture et d’assistance, le CEME accueille le Centre de vaccination installé depuis mars 21 pour lutter contre la pandémie. 

Au départ, le besoin en grandes surfaces l’a poussé à occuper l’ensemble du Centre Fourcault et une partie du CEME, mais, avec le temps, le centre de vaccination a réduit la voilure et s'est installé uniquement au CEME avec accès par la rotonde. Dirigé sur un plan logistique par Bruno Sépulcre, manager d’une société événementielle, universitaire et ancien officier para-commando, celui-ci allie efficacité, rapidité, diplomatie et discipline doucement consentie. Le centre de vaccination aura aussi fait connaître davantage le CEME au grand public mais pas uniquement… Une belle énergie amicale s’est développée entre le CEME et le centre de vaccination qui ajoute ce supplément d’âme aux lieux où il fait bon vivre. Les membres de cette équipe « agence tous risques » sont devenus les partenaires du CEME au quotidien, tel le chanteur de Mister Cover Nicolas Dieu, qui occupe le poste de responsable technique ou la douce Katia Dichiara qui rassure et oriente le public 

N.G. Des projets ? 

S.D. Il y en a plein les valises… Outre tous les espoirs de fêtes et de grandes réunions liées au déconfinement, on chuchote une future collaboration d’envergure avec Philippe Van Cauwenberghe, échevin du Troisième Age, l’implantation de la Maison des Aînés au CEME qui deviendrait la plaque tournante des activités seniors et bien d’autres surprises à dévoiler dans de futurs articles … Et pour ceux qui seraient inquiets pour les prochaines doses de vaccin, l'équipe continuera à veiller sur leur santé...

PROPOS RECUEILLIS PAR JEAN-CLAUDE HERIN

De Fourcault au CEME

les usines Fourcault 

Au 17ème siècle, Dampremy était avec Lodelinsart et Jumet le centre de l'industrie verrière en Belgique. Au début du 20ème siècle, Emile Gobbe, ingénieur verrier inventa la machine à traitement vertical du verre, mais il ne put industrialiser lui-même son invention. Il s' est associé alors avec Emile Fourcault (1862-1919) et ensemble, ils mirent au point un nouveau procédé d'étirage mécanique vertical du verre à vitres, en 1902. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le bâtiment est occupé par l'armée allemande, puis transformé en dépôt de marchandises militaires. En 1964, le Collège Echevinal décide de transformer le site en centre sportif et culturel. En 1972 débute la première phase des travaux de l'aile sportive. Dans ce cadre, d'anciennes salles et magasins de la verrerie sont conservés et rhabillés pour former un ensemble architectural cohérent.

En 1976 est inaugurée la salle omni-sports. En 1985, dans le cadre des rationalisations décidées dans la foulée des fusions des communes, la piscine est fermée. En 1998, les travaux commencent au Centre Fourcault en vue de sa transformation en Centre de Congrès. Les 23 et 24 septembre, la Ville de Charleroi a procédé à son inauguration.

J.C.HERIN

La Maison du Peuple est née au sein du milieu ouvrier

Implantée à la rue Julien Lahaut (anciennement rue Destrée), la Maison du Peuple « La Vigilance » (aujourd’hui « La Nouvelle Vigilance ») a été fondée en 1890 par les Chevaliers du Travail, une organisation syndicale assez radicale importée de leur exil aux Etats-Unis par d’anciens révoltés de 1886. Conservant une forme d'autonomie par rapport au Parti Ouvrier Belge (même si des liens existent), celle-ci va conserver une forme d’autonomie et regroupera après 1918 des membres du Parti communiste, mais cela n'a en fait pas pour autant un syndicat communiste à part entière. «  La Maison du Peuple va donc être, dès sa fondation, marquée par un ancrage marqué très à gauche, même si pluraliste, au sein du mouvement ouvrier » précise François D'Agostino, animateur et historien du Mouvement Ouvrier. «  En plus des activités politiques, des activités culturelles et d’éducation populaire, mais aussi de solidarité étaient organisées. Elle était principalement fréquentée par les mineurs ».

Robert Tangre, président de la Maison du Peuple. Photo: J.C.Hérin

une orientation politique et sociale

De nos jours, la Maison du Peuple reste attachée à la fois à cette histoire et à ces pratiques : elle abrite les activités de l’Association culturelle Joseph Jacquemotte (ACJJ), une association d’éducation permanente qui porte le nom d’un des fondateurs du Parti communiste de Belgique, et qui travaille sur différentes thématiques : histoire sociale et politique, solidarité internationale, critique et alternatives au système économique, démocratie et citoyenneté,…

L'ACJJ organise des activités d’éducation populaire, des ateliers artistiques et culturels, des expositions, des débats,... Le Cercle d’archives et d’histoire ouvrière Louis Tayenne, qui abrite sa collection dans le bâtiment, co-animé avec des bénévoles, dépend de l’ACJJ . Le Secours Populaire Wallonie-Bruxelles occupe également les lieux. Cette association d’entraide organise notamment la » Journée des oubliés des vacances » et les « Père Noëls Verts ». Robert Tangre est le président de la Maison du Peuple et administrateur délégué de l'association culturelle Joseph Jacquemotte.

J.C.HERIN

Un Espace Citoyen au service de la population.

Dampremy compte également sur son territoire un « Espace citoyen ». Il s'agit, en quelque sorte, d'une maison de quartier qui offre une foule d’activités aux habitants du quartier. «  Son action s’organise sur le territoire de Dampremy (en ses locaux mais aussi à l’extérieur) mais les habitants de Lodelinsart et Charleroi-Centre y sont également les bienvenus » précise Gauthier Duyck, responsable.

Gauthier Duyck, coordinateur de l'Espace Citoyen, Michel Segers, relais de quartier, Laure Barbet, secrétaire du CID, Stéphane Frère et Marie Dorjoux, président et secrétaire des Fiers Damrémois. Photo: J.C.Hérin 

« L’équipe de l’Espace citoyen est composée d’une dizaine de personnes, travailleurs sociaux au sens large (animateur, assistant social, éducateur) qui vont être à l’écoute des difficultés de chacun. Leur manière de faire à eux, c’est le collectif. Proposer des activités de groupe pour sortir de son isolement, rencontrer de nouvelles personnes, pour se découvrir de nouveaux centres d’intérêt, pour s’investir aussi dans son quartier en participant activement aux festivités qui s’y organisent. Valorisation, estime de soi, bien-être, participation, écoute et convivialité sont vraiment les maîtres mots d’un Espace citoyen ! ».

Etendre les services de la Maison des Parents

L'Espace Citoyen propose entre autres une école de devoirs pour les enfants de la première primaire à la quatrième secondaire, un service d’insertion sociale qui vise plus spécifiquement ces personnes « bousculées par la vie », des activités cuisine, relooking, relaxation, expression corporelle, bricolage, de « cohésion sociale »,...

Depuis 2006, une Maison des Parents s’intéresse plus particulièrement au dur métier de parents, en leur proposant diverses activités. « Notre ambition est de trouver les moyens d’étendre les services proposés par la Maison des Parents de Dampremy aux autres quartiers de Charleroi » précise Philippe Van Cauwenberghe, président du CPAS de Charleroi. « La lutte contre la précarité infantile est une des priorités inscrites dans notre Plan Stratégique Transversal (PST) ».

Soutenir les habitants dans leurs projets

Et puis, l’Espace citoyen, c’est aussi l’organisation ou plutôt la co-organisation avec des bénévoles et les deux comités de quartier : Le Comité d’Initiative de Dampremy (CID),  présidé par Jean-Noël Delahaye, et les Fiers Damrémois, dans la mise sur pied de toute une série de festivités dans le quartier : la Ducasse Saint-Rémy, Noël à la chapelle, Propremy, Be-Wapp, le cortège de Noël, 1, 2, 3 Soleil, la Fête du Parc, les après-midi parents-enfants pendant les congés scolaires, etc...

Comité des Fêtes des Fiers Damrémois 

«  Un des rôles du CID est de soutenir les habitants qui souhaitent développer des projets sur le quartier » signale Laure Barbet, secrétaire. « Le CID peut apporter une aide administrative et financière, par exemple, par un prêt de local ou de matériel. C’est, enfin, amener les habitants à s’informer sur leur quartier, à participer aux consultations organisées par la ville, à devenir des citoyens informés et actifs »

J.C.HERIN

Dampremy, terre de Ducasses

A droite: Jean-Noël Delahaye, président du CID 

La ducasse Saint-Rémy serait une des plus anciennes de la région. Elle disparaît en 1996, au profit des Fêtes la Bière, et réapparaît, grâce au CID et à l'Espace Citoyen, en 2005. Elle est dédiée à la fête du Saint Patron. Une première église lui a été consacrée vers le 9ème siècle. L'ancienne église Saint-Rémy était située sur la place communale (actuelle place De Crawhez). La première pierre a été posée le 8 mai 1870. L'église a été démolie en 1981 et 1982 pour le tunnel du métro.

Aujourd'hui l'emplacement de l'édifice est devenu une place où se déroule la ducasse Saint-Rémy. Lors des festivités, les géants Rémy Damp et Isma défilent joyeusement.

Les géants 

Une ducasse... au camp de Moscou !

La statue du Saint Patron est exposée toute l'année dans la chapelle Saint-Ghislain, et prise en charge par les Compagnons de la Marsaude, une lampe de mineurs. Décédé en 2019, Jean-Paul Delahaye a passé de très nombreuses années au service de la communauté damrémoise : il a été aussi très actif dans la préparation et la réalisation des activités liées au 1150ème anniversaire de Dampremy. Il a écrit de très nombreux ouvrages sur la localité. D'autres ducasses existaient sur Dampremy : ducasse du Pas-là-Haut, de la rue des Français, des 5 Chemins, du Centre... et même du Camp de Moscou.

Ce nom provient de l’établissement, à cet endroit en 1814, d’un camp de cosaques commandés par le général de cavalerie allemand Ferdinant Von Wintzingerode. Ceux-ci, rattachés à l’armée de Blucher, poursuivaient alors les troupes françaises en retraite. Ils ont participé à la campagne de France et au siège de Paris en 1815.

J.C. HERIN

Le nom de Dampremy, lié à Saint Rémi

En 511 : c'est sans doute à cette époque qu'apparaît pour la première fois le nom de « Dampremy », mais pour le rencontrer dans un document officiel, il faudra attendre 868. En effet, parmi les possessions des abbés de Lobbes, on trouve, cette année-là, dans le polyptique de l'abbaye, l'église et la villa de Dampremy. « Villa domni Remigii »  donne en français la villa de l'abbé : dom et Rémigii pour saint Remi. Les seigneurs de Dampremy ont souvent été des abbayes : Lobbes, Florennes, Malonnes, le prieuré Saint-Nicaise de Reims,...

Et encore... 2 femmes d'exception :

Laure Barbet et Monique Nockerman 

Monique Nockerman  : Cette Damrémoise, née en 1955, a toujours vécu à la rue Vangeersdaele. Son père, également Damrémois, a tenu la boulangerie « Nockerman », à côté de sa maison. Pour distribuer le pain, il se déplaçait en triporteur !  Monique a travaillé pendant 30 ans au Centre Fourcault comme secrétaire et assistante administrative. Elle est un peu « la mémoire vivante » de Dampremy, car elle possède chez elle des tonnes d'archives sur la localité.

Monique et le triporteur de son papa : photo: J.C.Hérin

Claudine Mahy a vécu à la rue Jules Houssière. Surnommée « Mémé Loubard », elle a chanté en français et en wallon, et a tourné dans le film « Marbie, Star de Couillu-les-2 Eglises » de Dominique Smeets. Elle est décédée en 2017.

La regrettée Claudine Mahy 

JEAN-CLAUDE HERIN 

Precious Chukwu (22 ans) a été accueilli en urgence au Centre Fédasil. Ce Nigérian a dû fuir successivement son pays et l'Ukraine en guerre. Une épreuve douloureuse pour ce jeune étudiant en informatique, ainsi que pour 7 autres réfugiés non ukrainiens.

Precious entouré de Adriano et Atar du Centre Fedasil à Jumet 

Aujourd'hui, Precious Chukwu est en sécurité au Centre Fédasil, entouré de toute une équipe bienveillante. Il peut à nouveau téléphoner à son père et lui donner des nouvelles. Mais le jeune homme garde les traits tirés : les derniers mois avant d'arriver à Jumet ont été terriblement éprouvants. Un retour en arrière permet de mieux comprendre : il y a un an, le jeune étudiant en informatique avait trouvé  un logement à Sofiyska, dans la banlieue de Kiev. « Conseillé par des amis, je croyais trouver le paix et la sécurité en Ukraine » fait-il remarquer. Comme pour bon nombre d'habitants, la guerre, déclarée subitement, l'a pris complètement au dépourvu.

« Je n'en pouvais plus. Les bombardements étaient incessants. Je montais sur le toit et je voyais le ciel illuminé, comme s'il s'agissait de feux d'artifice, mais c'étaient des obus au phosphore. Me sentant en danger permanent, mes conditions de vie y étaient devenues extrêmement pénibles » poursuit-il. Commence alors une longue marche de 5 jours. Avec d'autres personnes, Precious prend ensuite le train pour la Pologne.

obligé de rester debout dans le train

« Rapidement, les Ukrainiens, passagers tout comme moi, m'ont fait comprendre que je ne pouvais pas occuper une place assise. Quelqu'un est même rentré dans le train et m'a sommé de rester debout durant tout le trajet. J'estime que cette attitude était tout à fait discriminatoire à mon égard et je n'étais pas la seule personne d'origine étrangère à être traitée de la sorte » s'indigne-t-il. Et ce n'est malheureusement pas la seule épreuve que Precious a dû endurer. Avant de se rendre en Ukraine, le jeune homme a vécu l'horreur à Uburu au Nigéria. « Les indépendantistes appartenant à l'ethnie Igbo ont commencé à tout piller et à incendier mon village natal. Je n'avais pas d'autre choix que de partir» signale-t-il.

Kingsley Mmakamma fait partie aussi de ces réfugiés : « En Ukraine, je m'étais complètement reconstruit. J'ai fait des études et je suis devenu médecin. Mais je laisse au pays ma famille,  mon fils et ma compagne . J'ai l'impression de perdre tout à coup 10 ans de ma vie. C'est une situation vraiment dramatique, car je me considère Ukrainien à part entière».

JEAN-CLAUDE HERIN

Bientôt un statut identique pour réfugiés et Ukrainiens ?

80 centres d'accueil de Fédasil (Agence Fédérale pour l'accueil des demandeurs d'asile) sont répartis en Belgique. La capacité de Jumet est de 220 résidents : hommes et femmes isolés, familles et mineurs non accompagnés. Depuis peu, suite aux événements en Ukraine, le centre est occupé également par 3 Angolais, 2 Palestiniens et 2 autres Nigérians. Avec Precious, ils partagent comme point commun d'avoir fui l'Ukraine, mais de ne pas être de nationalité ukrainienne. « Quand nous avons appris que ces réfugiés ne disposaient pas d'une protection temporaire accordée aux Ukrainiens par l'Union Européenne, nous n'avons pas hésité à accueillir ces 8 nouveaux résidents. C'est le coeur qui parle avant tout, quitte à construire de nouveaux logements. Nous l'avons déjà fait avec l'afflux de réfugiés en provenance d'Afghanistan, de Syrie, d 'Irak, de Palestine...note Fabian Delobbe, directeur. Dans les jours à venir, une nouvelle législation pourrait voir le jour donnant aux réfugiés non Ukrainiens le même titre de protection que les Ukrainiens.

J.C.HERIN

                                                         L'équipe des Loufs

photo: Pierre Burssens 

Que faut-il penser d'une certaine chirurgie réparatrice qui pourrait aller jusqu'à fabriquer une société de clones ? Ce sujet pose question dans la pièce « Le Moche » de Marius von Mayenburg, à voir du 8 au 17 avril par la Compagnie des Loufs.

Découvrant avec effarement qu'il est moche, alors qu'il se trouve écarté de la présentation d'un projet dont il est l'auteur, Lette, un ingénieur dans une entreprise d'électromécanique, fait aussitôt appel à un chirurgien vénal « ravaleur de façade » qui lui taille un nouveau et beau visage. Les portes de nouvelles et propices expériences professionnelles s'ouvrent à lui, mais la progression s'arrête au moment où il découvre plusieurs répliques de lui-même... Voilà le pitch de la pièce : « Le Moche », une comédie, parfois aux accents dramatiques voire tragiques. écrite en 2007 par l'auteur allemand Marius von Mayenburg, traduite en 20 langues.

L’auteur propose 4 personnages qui peuvent revêtir des identités multiples, puisque ce sont juste des « façades ». Fanny, par exemple, sera tour à tour la femme de Lette, le moche, une assistante du chirurgien esthétique et une vieille dame nymphomane.

Le chirurgien devient un personnage complet

Seul Lette ne change pas. Même pas après l’opération, mais comme par hasard, il sera regardé différemment et même de façon très bienveillante par la vieille dame nymphomane.

« Avec Marius von Mayenburg, le spectateur s’apercevra que c’est surtout le regard des autres qui fait la différence. Cruel ou au contraire bienveillant, voire quémandeur » signale Jean-François Lacroix, metteur en scène. Par un jeu de lumière, les personnages passent d’une bulle à l’autre quand ils changent de contexte ou de relation. Le décor et les accessoires sont réduits, car beaucoup de choses sont suggérées. « Pour ma part, j'ai accentué le regard sur le chirurgien, en faisant de lui un personnage complet et non une des identités multiples revêtues par un des 4 personnages » poursuit Jean-François Lacroix.

«  Nous avons donc 5 personnages en scène et un figurant. J’ai fait du chirurgien un personnage falot, égocentrique, incompétent et surtout vénal. Cela donne lieu à des opérations aux allures de vaste blague

Cela donne lieu à des opérations aux allures de vaste blague : cérémonies chamaniques caricaturales, où ce chirurgien et ses 2 assistants sont déguisés en gourous ridicules, membres d’une mystérieuse secte venue du fin fond des Andesou d’Asie. Tout cela sur une construction sonore et musicale, et tout aussi pastiche. Et ces « cérémonies » sont doublées d’images suggestives de l’opération, diffusées par un écran.

Avec Maximilien Binon, Odette Feron, Stéphan Lessinnes, Maryse Neirynck, Danino Taccetta et Eddy Verset.

« Le Moche » par la Compagnie des Loufs est à voir au Centre culturel de Mont-sur-Marchienne, 3, rue du Château, les 15 et 16 avril à 20h et le dimanche 17 avril à 16h. Réservations : 0473/77 02 13 et 0476/84 9307. Prix : 12 euros. Moins de 18 ans : 8 euros.

JEAN- CLAUDE HERIN